À Saint-Hyacinthe, le premier citoyen à posséder une automobile fut le marchand Napoléon Rouleau qui, en juillet 1903, avait acheté une Stanley usagée, mue par la vapeur. Insatisfait, il l’a échangée le mois suivant pour une Cadillac, d’un cylindre de 5 ½ x 6 ½ pouces, capable d’atteindre 20 milles à l’heure. Monsieur Pagnuelo, vendeur de voitures à Saint-Hyacinthe au début du 20e siècle, se souvient avoir débuté comme apprenti-chauffeur sur cette Cadillac.
En 1905, Monsieur Wilson d’Ottawa a ouvert une succursale pour la vente des autos à Montréal et confia la gérance du garage de cette succursale à Arthur Fontaine. C’est avec lui que Monsieur Pagnuelo s’est perfectionné.
En 1907, le marchand J.L. Bergeron a introduit la première voiture neuve à Saint-Hyacinthe : une Ford modèle N. Il demanda à monsieur Pagnuelo de lui enseigner à conduire son véhicule qui, avec ses quatre cylindres, était capable d’aller à 30 milles à l’heure.

À cette époque, ce n’était pas chose facile que de sortir en automobile à la campagne : les aboiements et les hurlements des chiens reconduisaient ces « chars » d’un rang à l’autre. Lorsqu’ils croisaient une automobile sur la route, les chevaux prenaient l’épouvante, sautaient les fossés et les clôtures. Le contenu qu’ils transportaient se renversait sur la chaussée… les dames y comprises. « Les cultivateurs nous menaçaient de leurs poings et nous récitaient des litanies qui dans leur langage, n’avaient rien de diplomatique » disait Monsieur Pagnuelo.
Les routes étaient affreuses et c’était une exception rare que de pouvoir faire un voyage, sans deux ou trois crevaisons, en plus de troubles de moteurs ou autres. La gazoline s’achetait au prix de 0,19 $ le gallon, pour de la 76 de gravité, et on se la procurait au magasin Bourgeoys.
En 1908, Paul-F. Payan a acquis une McLaughlin-Buick à deux cylindres, avec laquelle il pouvait atteindre 35 milles à l’heure. En 1909, l’honorable T-D Bouchard et le dentiste Fournier ont chacun acheté une Réo à deux cylindres, qui pouvait atteindre 30 milles à l’heure.
En 1909, apparut sur le marché une automobile avec des roues arrière de 40 à 42 pouces et des pneus en caoutchouc dur de marque Tud-Hope McIntyre de Brockville, Ontario. Avec cette auto, pas de crevaison possible! Les nouveaux propriétaires en étaient messieurs Héribel et Marcoux. Peu de temps après, ils s’empressèrent de se départir de ces voitures dont les succès étaient loin de ceux attendus.
En 1910, J.L. Bergeron échange sa Ford modèle N pour une Ford modèle T, la première voiture neuve de Saint-Hyacinthe. Cette année-là, Thomas E. Fee, G.P. Payan et son fils Jules ont chacun acquis une McLaughlin-Buick à quatre cylindres. Très puissante pour l’époque, elle pouvait facilement atteindre 50 milles à l’heure. Selon un article du Journal l’Union daté du 7 juillet 1910, on compte une quinzaine d’automobiles à Saint-Hyacinthe. Quinze ans plus tard, on estime que ce chiffre est passé à 790.
En octobre 1910, la compagnie Ford a ouvert une succursale à Montréal et monsieur McGregor, président de Ford Canada, a offert à monsieur Pagnuelo l’agence pour Saint-Hyacinthe et les environs. Ce dernier s’engage alors à vendre dix voitures durant la prochaine année. Il surpasse l’objectif puisque, tout en travaillant chez Bell téléphone, il vend dix-huit voitures en 1911. De ce nombre, il eut la première voiture fermée à Saint-Hyacinthe, une limousine à sept places, vendue à messieurs Cadorette, Mongeau et Leary, entrepreneurs de pompes funèbres, au prix de 1175$. Les voitures de promenade à cinq places se vendaient alors 975$.

Voyant l’ampleur que prenait l’automobile, monsieur Pagnuelo quitte son emploi chez Bell pour se consacrer exclusivement à son commerce d’automobiles. Durant la première moitié du 20e siècle, à Saint-Hyacinthe, on retrouvait principalement les vendeurs de voitures au centre-ville. Les ventes augmentaient, et bientôt, des voitures plus dispendieuses ont fait leur apparition sur le marché maskoutain. À cette époque, le vendeur devait effectuer de nombreuses démonstrations accompagnées de toutes sortes d’explications, en plus d’enseigner à conduire à chaque acheteur.
Le 20 juin 1913, un groupe de 15 citoyens, comprenant H.-Armand Pagnuelo, présente une requête à la Ville de Saint-Hyacinthe pour la formation d’un club d’automobilistes, l’Auto-Club de Saint-Hyacinthe.

D’après les articles d’Alexandre Campbell parus dans le Courrier de Saint-Hyacinthe du 29 mars 1978 et dans le cahier Patrimoine de 2013.
Sources :
Témoignage de H.-Armand Pagnuelo (1885-1965)
Journaux : L’Union, Le Courrier de Saint-Hyacinthe et Le Clairon