Article paru dans Le Courrier de Saint-Hyacinthe le 30 avril 2009
Catégorie: Patrimoine bâti
Sous-catégorie: Maisons de la rue Girouard
Auteure: France Labossière
Entre la maison de Magloire Turcot et celle de Louis Côté, se situe un site riche en histoire. En effet, sur ce terrain ont été érigées deux maisons où plusieurs personnages importants de Saint-Hyacinthe ont élu domicile au fil des ans. Adolphe Malhiot, médecin et quatrième maire de la ville, de 1866 à 1867, est de ceux-là.
Monsieur Malhiot, qui fut propriétaire de la première maison de 1857 à 1876, avait acquis la demeure du notaire Horace St-Germain, comme l’indique le contrat d’achat de 1857 : « Horace St-Germain, 1er notaire public de la cité ville de Saint-Hyacinthe, a reconnu avoir vendu un lot joignant en front la dite rue Girouard, en profondeur la rue Dessaulles, du côté sud ouest partie Magloire Turcot, avec une maison en brique avec étage, une étable, remise et autres bâtisses sus érigées. »
Les documents consultés nous confirment que c’est bien monsieur St-Germain qui avait fait ériger cette maison. En effet, ce dernier achète de monsieur Donald George Morison, en 1851, un terrain sans bâtisse entre les rues Girouard et Dessaulles parallèlement à la rue Laframboise. En 1854, il contracte un emprunt de la Trust and Loan Cie et le contrat, rédigé en anglais, fait déjà mention de la présence de la maison d’un étage, en brique : « […] a lot of ground in front by Girouard Street, in rear by the said Horace St-Germain, on one side by Magloire Turcotte (sic) with a one story brick house there one erected » La première maison du site a donc été construite entre 1851 et 1854 pour le notaire et registrateur Horace St-Germain qui l’aura très peu de temps en sa possession.
En 1876, monsieur Adolphe Malhiot lègue par testament, un lot de terre en la cité de Saint-Hyacinthe sur la rue Girouard avec une maison en briques à un seul étage et autres bâtisses de bois à sa fille Josephte Rosalie Hermine Malhiot qui décède à son tour en 1878. La maison devient, comme elle le spécifie dans son testament, la propriété de son époux Me Louis Tellier, un avocat important de Saint-Hyacinthe à l’époque : « Je lègue tous mes biens à mon cher mari Louis Tellier pour faire lui en jouir sa vie durant à la charge de les rendre ensuite à mon tendre fils Louis »
L’année suivant le décès de son épouse, en 1879, Maître Tellier charge la firme montréalaise Cousineau et Valiquet de démolir la maison dont il a hérité, afin d’en reconstruire une autre, sur le même emplacement. Un rapport d’expertise notarié en 1880 décrit très bien les travaux : « après examen du dit emplacement il a témoigné que la vieille maison en brique, qui existait sur le dit emplacement et qui était construite sur solage en pierre et couverte en bardeau a été démolie ainsi que le solage de la vieille maison laquelle a été remplacée par une maison en brique à un étage et demie construite par les dits Cousineau et Valiquet sur un solage en pierre nouveau, cette maison étant de même largeur et profondeur que celle qu’elle a remplacée ».
Cette deuxième maison, à la hauteur du statut social de son propriétaire, est donc celle que l’on peut voir actuellement sur le site. La photo ancienne nous permet de constater la qualité de conservation de cette demeure ancestrale coiffée d’un toit à deux versants, avec perron-galerie. Plusieurs éléments architecturaux tels les pignons et les fenêtres à l’étage en forme d’arc brisé font de cette habitation une construction d’inspiration néo-gothique. Ces éléments donnent de la verticalité à la composition, telles les cathédrales gothiques de l’époque médiévale.
Les éléments décoratifs extérieurs, comme les ornementations aux corniches et pignons, et surtout la tour en façade, donnent à l’ensemble une allure prestigieuse qui témoigne de l’évolution du style à la fin de la période victorienne. Les modifications ultérieures n’ont que très peu altéré l’authenticité de la maison.
En 1894, Maître Tellier cèdera la maison, comme le désirait son épouse, à leur fils Louis. Ce dernier en sera le propriétaire jusqu’en 1897.
D’autres personnalités importantes s’y succédèrent tels certains membres de la famille Payan qui étaient propriétaires d’une entreprise réputée de tannerie à Saint-Hyacinthe : la maison Duclos et Payan. Dans les années ‘30, des médecins y demeurèrent, comme le confirment les écrits de monseigneur Choquette.