Catégorie: Fêtes et événements
Sous-catégorie: St-Jean Baptiste
Auteur: Vincent Bernard
L’histoire des célébrations entourant la Saint-Jean-Baptiste, aussi nommée Fête nationale du Québec, en est une chargée qui mérite d’être mise en lumière. Dans son mémoire de maîtrise intitulé Le lys en fête, le lys en feu : La Saint-Jean-Baptiste au Québec de 1960 à 1990, l’historien Marc Ouimet nous propose notamment un survol historique des célébrations du 24 juin, dont voici quelques éléments clés nous permettant de bien saisir l’essence et la charge historique entourant cette manifestation populaire bien québécoise.
Des origines lointaines
Certains des éléments entourant les célébrations de la Saint-Jean-Baptiste trouvent racines dans l’Antiquité. C’est le cas des feux de joie liés aux fêtes agraires du solstice d’été : « Le culte de la lumière, celle du soleil reproduite par celle du feu, marquait donc le jour le plus long de l’année qui, d’après le calendrier julien, tombait alors le 24 juin […]. En plus de son caractère de rite de passage saisonnier, la fête du solstice d’été marquait également un jalon dans le cycle de production agricole, alors que s’entamaient les grands travaux agricoles qui ne s’achèveraient qu’à la fin de l’été ».
Pourquoi saint Jean-Baptiste
C’est en 1834 que des sympathisants patriotes, dont Ludger Duvernay, décrètent que saint Jean-Baptiste devient le saint patron de la nation canadienne et que sa fête soit également la fête nationale. La raison du choix de ce dernier reste toutefois nébuleuse. L’historien Ouimet souligne : « qu’une loge maçonnique anglophone dirigée par John Molson fils avait l’habitude de tenir un banquet le 24 juin, l’aspect solaire de la fête revêtant une grande importance dans la cosmogonie maçonnique. Il n’est donc pas impossible que les sympathisants patriotes organisés autour de Duvernay aient voulu y faire contrepoids, d’autant que plusieurs étaient franc[s]-maçons eux-mêmes ».
Au lendemain des Rébellions des Patriotes en 1837-1838, le symbole de saint Jean-Baptiste passe de figure politique forte et revendicatrice à une vocation agraire et missionnaire : « selon le catéchisme clérico-nationaliste liant de façon intrinsèque la religion catholique et l’héritage français à préserver de la population et qui marqua les représentations collectives de la nation canadienne-française pour près d’un siècle ». C’est durant la seconde moitié du XIXe siècle que la forme traditionnelle de la fête se met en place notamment sous la responsabilité de la nouvelle Association Saint-Jean-Baptiste de Québec. Dans plusieurs village on retrouve une grand-messe, un défilé, des feux d’artifices et un feu de joie. Vers 1866, le petit garçon aux cheveux frisés accompagné d’un mouton et représentant saint Jean-Baptiste fait son apparition. C’est également durant cette période que les chars allégoriques prennent leur place au sein du défilé.
L’évolution des célébrations durant le XXe siècle
Quelques dates importantes marques l’évolution des festivités entourant la Saint-Jean-Baptiste durant cette période. D’abord, en 1925, l’Assemblée nationale du Québec décrète le 24 juin jour férié et chômé. En 1948, le gouvernement de Maurice Duplessi adopte le Fleurdelisé comme emblème national du Québec. Le drapeau québécois devient ainsi le symbole par excellence de la nation canadienne-française, puis québécoise durant les célébrations de la Saint-Jean.
Les années 1960 sont marquées par des tensions visant notamment à changer le visage de la Saint-Jean-Baptiste. On constate alors le passage : « d’un visage traditionnel et élitiste à un autre nettement plus populaire et sécularisé […] ». En 1977, le gouvernement officialise la Saint-Jean-Baptiste en tant que fête nationale du Québec, qui marque en quelque sorte le passage vers une évacuation du référent canadien-français et l’appropriation d’une identité québécoise.
Photo de couverture: Char allégorique du défilé de la Saint-Jean en 1960. Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe, Fonds CH548 Raymond Bélanger, photographe.