Article paru dans le Le Courrier de Saint-Hyacinthe le 16 mars 2017
Catégorie: Éducation
Sous-catégorie: Écoles
Auteur: André A. Bourgeois
Du Rapport Parent, à l’achat du terrain
En 1960, à la suite de l’élection du Parti libéral de Jean Lesage, on a constaté le retard de la société québécoise en matière d’éducation. Les Québécois étaient très peu scolarisés. Seulement 13 % des jeunes francophones terminaient leur 11e année et à peine 4 % fréquentaient l’Université contre 11 % des jeunes anglophones. Pour Lesage, ce constat d’échec, ainsi que la croissance démographique (l’arrivée des baby-boomers), et un développement économique accéléré provoquèrent une réaction immédiate. Dès 1961, on met sur pied une Commission royale d’enquête sur l’enseignement ; ce qui débouchera sur le célèbre Rapport Parent.
En 1963, les premières ébauches du rapport seront dévoilées. Une vision humaniste et quelque 500 recommandations feront partie du travail, avec comme toile de fond la démocratisation de l’éducation. Les points saillants seront : l’école obligatoire jusqu’à 16 ans, l’abolition des collèges classiques, la création des écoles polyvalentes, la mise sur pied des cégeps, l’instauration du réseau des Universités du Québec, un régime de prêts et bourses et la création du Ministère de l’Éducation. En recommandant l’abolition du cours classique, le rapport dénonce la hiérarchie des formations, dont les plus nobles étaient associées à la pratique du droit, de la médecine et de la prêtrise. La nouvelle école sera donc créée pour l’accessibilité du plus grand nombre, de la réussite scolaire et aussi pour ceux ayant des difficultés d’apprentissage. (Source : Actualités UQAM 2013.)
À la Commission scolaire régionale de l’Yamaska, commission scolaire consacrée à l’enseignement au secondaire, on amorça la quête d’informations sur le modèle dit « école polyvalente », dès le milieu de la décennie 1960. On voulait bien se renseigner sur ce format d’école ouverte à tous qui offre des cours généraux obligatoires et des cours techniques et professionnels à options, permettant aux élèves de suivre des cheminements diversifiés selon les talents et les centres d’intérêt de chacun. Les premières démarches seront une visite à la première école polyvalente , « La cité des jeunes » de Vaudreuil et une visite en Ontario en 1964. Ensuite, on procéda à l’achat d’un terrain appartenant à la Corporation du Séminaire de Saint-Hyacinthe (qui deviendra l’Oeuvre Antoine-Girouard en 1968), le 19 septembre 1966. Le coût de l’acquisition fut de 439 522 $, soit environ 3,5 M$ en 2017. D’autres parties de lots furent acquises, dont un lot de la terre de monsieur Albert Laperle.
Une première maquette sera demandée au bureau d’architectes Cayouette, Tanguay, Desnoyers, Mercure en 1967 au coût de 800 $. Les plans et devis définitifs furent finalement approuvés par la Commission scolaire, le 24 février 1971. Le Ministère de l’Éducation confirmera à son tour son approbation, le 2 mars 1971. Les soumissions seront ouvertes le 20 avril 1971. Le contrat sera attribué le 22 juin 1971, à l’entrepreneur Fernand J. Labrosse. Les travaux débuteront finalement le 2 juillet 1971. L’école polyvalente s’appellera Hyacinthe-Delorme (P.H.D.), en l’honneur du premier seigneur actif de la seigneurie, Jacques-Hyacinthe Simon dit Delorme. L’école devait être livrée pour l’année scolaire 1972-1973.
L’ouverture de l’école polyvalente redessina toute la carte du niveau secondaire public sur le territoire desservi par les commissions scolaires de Saint-Hyacinthe et Val-Monts. Tout d’abord, il fut décidé que la nouvelle école accueillerait les élèves des secondaires 3, 4 et 5, puisque les écoles Casavant et Fadette desserviraient ceux des deux premières années du secondaire. Ainsi, au cours de l’été 1972, il fallut transporter tous les équipements encore adéquats des anciennes écoles vers la nouvelle école. Deux écoles furent déclarées obsolètes. L’académie Girouard fut soumise au pic des démolisseurs, quelques années plus tard. L’école Notre-Dame, ancienne École de Laiterie et ancêtre de l’ITA demeura longtemps abandonnée, avant qu’on la démolisse, suite à un incendie.
Parmi les autres écoles qui changèrent de statut, il y avait les écoles qui recevaient les filles des deux premières secondaires. L’école Saint-Dominique, qui est devenue la bibliothèque T.A.-St-Germain, de la Médiathèque maskoutaine. L’école Mercier est maintenant le siège social de la Commission scolaire de Saint-Hyacinthe. Du côté des garçons, hormis l’académie Girouard qui était une grande école pour l’époque, il y avait quelques classes de garçons à l’école Maurice-Jodoin dans le secteur Saint-Joseph et quelques classes mixtes à l’école Saint-Charles-Garnier dans le secteur La Providence. Certaines écoles à vocations particulières furent aussi fermées. L’école de métiers de la paroisse Assomption, la partie technique secondaire de l’école textile, qui deviendra plus tard, l’école René-St-Pierre et l’école Christ-Roi, qui renferme maintenant le Carrefour des organismes communautaires maskoutains. Il serait bon de mentionner que l’organisation scolaire du territoire était complétée par trois écoles privées ; le Séminaire, le Collège Saint-Maurice et l’École secondaire Saint-Joseph.
Le chantier de la nouvelle école rencontra quelques embûches si bien que l’inauguration officielle de la P.H.D. ne se fit que le dimanche 4 novembre 1972, avec la bénédiction de l’évêque. Pour ce qui est des élèves, ils furent conviés à un rassemblement au monument Hyacinthe-Delorme au centre-ville, le mercredi 31 octobre 1972. Le premier directeur fut monsieur Gérald Gagnon. Il était secondé par cinq adjoints, chacun représentant une famille. Ces familles étaient le regroupement d’élèves selon leur niveau d’étude ou leurs options. Les adjoints étaient ; messieurs Yves Blanchette, Gaston Gagnon, Rolland Gauvin, Jacques Lévesque et madame Marguerite Jodoin. Cette équipe de direction était complétée par 2 administrateurs, 162 enseignants, 9 consultants et 17 personnes aux services auxiliaires.
Au niveau physique, l’école comptait 2 grands gymnases; une palestre; un centre de documentation de 278 places assises; un auditorium de 529 fauteuils et une cafétéria de 850 places. Il y avait aussi 12 ateliers professionnels, 4 salles d’arts plastiques et 3 salles de musique. Le coût total de construction s’éleva à 5,8 M$. Sa construction en 2017 oscillerait autour de 72 M$.
L’école fut construite selon les aspirations du Rapport Parent : remettre entre les mains des maîtres et des écoliers un instrument qui leur permette de travailler de façon dynamique. La pédagogie devait déterminer le plan d’une école. Le plan en forme de X comprend une aile académique, une aile bibliothèque et cafétéria, un complexe sportif et une aile d’ateliers. Au centre, une grande salle est prévue, servant d’échangeur et de lieu de rassemblement des élèves durant les pauses.
Ainsi donc, depuis 1972, l’école Polyvalente Hyacinthe-Delorme regroupe sur un même campus les programmes d’études qui se donnaient autrefois, dans les collèges classiques, dans les écoles secondaires traditionnelles et dans les écoles d’arts et métiers.
Photo de couverture: La polyvalente en construction. Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe, Fonds CH380 Le Courrier de Saint-Hyacinthe.