Article paru dans Le Courrier de Saint-Hyacinthe le 22 décembre 2022
Catégorie: Transport
Sous-catégorie: Ponts
Auteur: Martin Ostiguy
Jeudi le 12 décembre 1912, Louis-Alexandre Taschereau, ministre des Travaux publics dans le cabinet de Lomer Gouin, présente un projet de loi visant à abolir le péage sur les trois ponts de Saint-Hyacinthe. À cette époque, chacun des ponts avait un propriétaire qui exigeait, par l’entremise d’un gardien, un droit de passage aux usagers. Le projet de loi est présenté à la demande de Télesphore-Damien Bouchard, député provincial de Saint-Hyacinthe depuis peu. Il prévoit que le gouvernement paiera la moitié des coûts d’entretien engendrés par l’abolition. Les municipalités devront s’acquitter de l’autre moitié des frais.
Il y a longtemps que cette question de l’abolition du droit de passage sur les ponts de la ville est dans l’air. En 1888, Honoré Mercier, alors député du comté, conclue à l’opportunité du rachat des ponts et de l’abolition des droits de passage. Il est alors question d’allouer 60 000 $ aux municipalités concernées pour parvenir à ces fins. Si le projet n’aboutit pas à l’époque, c’est que plusieurs citoyens considéraient que les frais d’entretien des ponts et même leur reconstruction en fer, devraient être pris en charge par le seul gouvernement provincial. Il était également question qu’un seul pont entretenu par le Canadien Pacifique, remplace les trois ponts. Ce pont servirait à la fois pour les piétons, les voitures et les trains. Devant le manque de consensus, le statu quo est maintenu pendant encore quelques années.
En 1909, le greffier de la ville, T.-D. Bouchard, prend les choses en main. Durant trois ans, on discuta de la contribution des municipalités. La Providence participera à l’entretien général des ponts à hauteur de 25 %. Saint-Joseph et Notre-Dame paieront respectivement 15 et 10 % des frais et Saint-Hyacinthe s’acquittera du 50 % restant. Le plus gros problème fut de s’entendre avec les citoyens de Saint-Hyacinthe le Confesseur. Ils sont en effet propriétaires de leur pont, le Pont de la Société (actuel Pont Bouchard), contrairement aux ponts Morison et Barsalou qui appartiennent à un propriétaire unique. Ils ont tous effectué un paiement unique de 100 $ qui leur donne un droit de passage à perpétuité. On finit par régler le litige en leur garantissant l’utilisation de tous les ponts sans jamais contribuer à leur entretien.
En 1912, T.-D. Bouchard devient député provincial et il parvient à convaincre son gouvernement de verser la somme de 60 000 $ promise en 1888 pour la mise sur pied du projet. Pour Bouchard, ce projet est très important. Il considère que le prélèvement de taux de péage sur les ponts constitue une entrave au commerce, à l’industrie, à l’agriculture ainsi qu’à la libre circulation des citoyens.
Reste maintenant à indemniser les propriétaires des ponts. On consacre 35 000 $ à cette fin. Les héritiers de Lewis Francis Morison reçoivent 17 500 $ pour le rachat du pont Morison. Les deux propriétaires du Pont Barsalou, le docteur Ulric Jacques et Gédéon Beaupré reçoivent le même montant pour le rachat de leur pont. Le 25 000 $ restant de l’octroi étant insuffisant pour la reconstruction en fer du Pont Barsalou et le redressement du Pont Morison pour qu’il soit aligné avec la rue Concorde, les citoyens de Saint-Hyacinthe fournirent un 30 000 $ additionnel.
C’est ainsi que la ville, par l’entremise de T.-D. Bouchard, s’assura la possession intégrale des trois ponts et le libre passage sur chacun d’eux pour voitures et piétons.