L’hypnotisme de spectacle

Catégorie: Arts

Sous-catégorie: Spectacle

Auteur: Martin Ostiguy

L’hypnotisme de spectacle (on parle davantage d’hypnose lorsqu’il s’agit de science), existe depuis la deuxième moitié du XIXe siècle. Des hypnotiseurs vont se servir de cette faculté qu’ils ont de manipuler l’inconscient d’un sujet, non pas pour le guérir d’une pathologie ou d’une manie, mais pour distraire un auditoire. Évidemment cette pratique sera longtemps décriée, à la fois par l’Église et par les scientifiques. Cette thérapie, du fait qu’elle s’applique à l’inconscient, a longtemps été associée au spiritisme et à l’occultisme.

Évidemment, l’utilisation de l’hypnose s’accompagne d’un risque. D’ailleurs, les journaux aiment bien rapporter les séances d’hypnotisme ayant mal tournées. Par exemple, dans Le Courrier du 23 mai 1901, on rapporte un tragique incident qui eut lieu à Woonsocket dans le Rhode Island. On pose une lourde pierre sur Thomas Bolton, un jeune homme endormi par le « professeur » Fransworth. Le professeur demande à un spectateur de briser la pierre avec un marteau… Le jeune homme ne survivra pas à cette expérience… Dans Le Courrier du 7 novembre 1903, on raconte également la mésaventure d’un hypnotiseur à St-Paul dans le Minnesota qui, ne parvenant pas à réveiller son sujet, prit la fuite de peur d’être lynché par la foule. Au moment d’aller sous presse, on n’avait toujours pas réussi à démagnétiser le malheureux spectateur et on craignait pour sa vie…

Hypnotiseur vers 1915
Hypnotiseur, vers 1915. Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe, Fonds CH085 Studio B.J. Hébert, photographe.

Le 24 mars 1927, le père Dominicain Constant Doyon, aumônier honoraire du régiment de Saint-Hyacinthe, donne une conférence au mess des officiers. S’il croit que l’hypnotisme peut être permis dans des circonstances graves, il déplore son utilisation à des fins de spectacles, arguant qu’elle peut entraîner de lourdes conséquences. Il évoque le souvenir de deux personnes de sa connaissance qui ont fini à l’échafaud car elles avaient été hypnotisées dans leur jeunesse. Un article rédigé dans Le Courrier par le père Alexandre Dugré le 27 décembre 1935, met les lecteurs en garde contre ces spectacles qu’il juge indignes de bons catholiques. Il déplore que certaines personnes rejettent les dogmes de l’Église et gobent tout ce que peuvent leur raconter ces devins, hypnotiseurs et voyants.

Romeo the Great en 1951.
Romeo the Great en 1951. Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe, Fonds CH548 Raymond Bélanger, photographe.

 

Spectatrice incommodée lors d'un spectacle de Romeo the Great.
Spectatrice incommodée lors d’un spectacle de Romeo the Great. Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe, Fonds CH548 Raymond Bélanger, photographe.

 

Cette désapprobation du clergé n’empêche pas plusieurs hypnotiseurs de fouler les planches en sol maskoutain. Le public est friand de ces spectacles qui promettent des sensations fortes. Ainsi, le Théâtre Corona met souvent à l’affiche des représentations d’hypnotiseurs et magiciens. En 1951, Saint-Hyacinthe reçoit en grandes pompes, le fameux Roméo The Great, les 19 et 20 décembre 1951 à la salle des Bazars de l’Hôtel-Dieu. On fait toute une publicité pour souligner l’événement. Une personne, hypnotisée par Roméo The Great, passe chacune des deux journées endormie dans les vitrines des magasins Léo Trudel et Gobeille & Brouillette. Par contre, lors du spectacle, quelque chose tourne mal et une spectatrice endormie est envoyée à l’hôpital…

Comme on peut le constater, le célèbre Mesmer n’a rien inventé et l’hypnotisme de spectacle existe depuis fort longtemps!

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