The St. Hyacinthe Distillery Co. Ltd

Article paru dans Le Courrier de Saint-Hyacinthe le 25 décembre 1991.

Catégorie: Industries

Sous-catégorie: Distilleries

Auteur: Raoul Bergeron

En raison d’une situation géographique exceptionnellement avantageuse, de sa proximité avec Montréal, de facilités de transport par chemins de fer et d’une main-d’oeuvre abondante et industrieuse, notre ville devint, dès le milieu du XIXe siècle, un des centres industriels les plus importants de la province. Plusieurs des industries installées chez nous depuis longtemps durent cependant, au cours des ans, cesser leurs activités pour diverses raisons.

Il est bien certain, par exemple, que le ralenti économique, suite au krach de la Bourse de 1929, contraignit plusieurs de nos usines soit à cesser leurs opérations, soit à les diminuer considérablement. Ainsi, en mars 1935, en pleine crise économique, on procéda à la démolition de la “St. Hyacinthe Distillery Co. Ltd”. Cette entreprise implantée dans notre ville depuis le début du siècle avait connu des jours d’activité fébrile pour ensuite éprouver des difficultés financières qui amenèrent sa disparition à la fin des années vingt.

Le Dr J.-A. Tellier, médecin vétérinaire de Saint-Hyacinthe, reconnu pour être un personnage particulièrement entreprenant dans plusieurs domaines avait mis en opération dès 1902 une fabrique de vinaigre. Il vendit toutefois son entreprise à la “St Hyacinthe Distillery Co. Ltd” en janvier 1904, au moment même où cette dernière commençait à opérer sous la direction d’un homme d’affaires de Drummondville, monsieur J.-Ovide Brouillard. Cette transaction explique en quelque sorte la confusion qui a pu exister à un moment donné alors que certains donnaient le Dr Tellier comme fondateur de la distillerie, alors qu’en réalité l’initiative fut bien celle de monsieur Brouillard.

Distillerie
Publicité de The St. Hyacinthe Distillery Company Limited. Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe, Fonds CH478 Société d’histoire régionale de Saint-Hyacinthe.

L’usine, dont la production d’alcool dépassait 150 000 gallons annuellement, constituait un excellent débouché pour les cultivateurs de la région qui venaient y écouler leurs céréales, surtout le maïs. Un des produits que la distillerie mettait sur le marché sous l’étiquette de “National Canadian Whisky” connu très tôt une renommée considérable, non seulement au Canada mais également aux États-Unis. Le fait que l’usine fut située à proximité de la gare du chemin de fer des Comtés-Unis facilitait grandement le transport de ses produits vers les états américains.

Il va sans dire, que le gouvernement canadien par l’entremise de son ministère du Revenu “veillait au grain”, car l’alcool était frappé par de lourds impôts et rapportait bon an mal an plus de 300 000$ au Fisc. En gens d’affaires avisés, les propriétaires voyaient à ce que rien ne se perde. C’est ainsi que les résidus en pulpe de céréales servaient à engraisser le bétail de boucherie. Des étables immenses furent construites, la première en 1906 avait un espace de plancher de 13 000 p.c. et abritait plus de 200 têtes de bovin.

À l’hiver de 1919, une tempête d’une extrême violence emporta les toits de plusieurs bâtiments et laissa le bétail exposé aux quatre vents par un froid sibérien. Le troupeau fut décimé par la maladie et les pertes matérielles furent tellement considérables que les propriétaires décidèrent de mettre fin à ce type d’opération.

Publicité de The St. Hyacinthe Distillery Company Limited. Centre d'histoire de Saint-Hyacinthe, Fonds CH478 Société d'histoire régionale de Saint-Hyacinthe.
Publicité de The St. Hyacinthe Distillery Company Limited. Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe, Fonds CH478 Société d’histoire régionale de Saint-Hyacinthe.

Les lois restrictives sur la consommation de l’alcool après la guerre de 1914-18, la vague prohibitionniste aux États-Unis d’une part et l’instauration de la Commission des Liqueurs au Québec d’autre part, furent à ce point contraignantes qu’elles finirent par affecter considérablement cette industrie. La distillerie se mit à péricliter au milieu des années vingt et elle fut absorbée finalement par la “Consolidated Distillery Co.”. La machinerie fut vendue petit à petit et l’espace en plancher servit uniquement à l’embouteillage, puis à l’entreposage et en fin de compte les bâtisses furent laissées à l’abandon.

En mars 1935, un entrepreneur maskoutain, monsieur Armand Bourbeau, ingénieur civil, se porta acquéreur de l’immense complexe de quatorze bâtisses pour les seules fins de démolition et de récupération des matériaux. Une seule de ces bâtisses échappa à la démolition et servit, pour un temps, à l’usine de la « Canadian Corduroy” qui disparut à son tour dans le courant des années soixante.

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